LE CHENE
 
   Pauvre chêne, tu crois gouverner la forêt
   Mais tu es si grand que tu ne vois qu'à ta hauteur
   Hêtres ou peupliers qui te courbent la tête au moindre bizé
   Alors que là, sous les branchages, où vivent tes sujets
   Les fraises libertinent, les fleurs charment les papillons
   Ou font l'amour à leurs heures
   Alors que les violettes complotent dans un coin
   Avec l'aide des fougères, qui tout en écoutant le vent
   Les préservent des méchants.
 
   Tout ce petit monde que tu ne connais pas te hait
   Et c'est toi que l'on nomme pour représenter le pays.
   Un oiseau parfois te souffle une histoire
   Mais tu ne comprends pas son language.
 
   Pauvre chêne si grand, si fort
   Qui ne voit pas plus loin que son pied
   Que connais tu de la vie
   Sinon l'aisance, la richesse, la beauté menteuse
   Tout ce qui ne fait pas une vie.
   Et sais-tu encore aimer?
 
   Tu vivras beaucoup plus que les autres
   Mais tu n'auras pas vécu
   Seulement passé, passé...
Jean Pierre
BERTAINA