Mais revenons à nouveau aux années 1968/1970 pour évoquer ce qui va devenir avec la musique une passion et qui ne m'a jamais quitté: la peinture et la sculpture puis ensuite la rénovation de vieilles pierres. Parallèlement je composais des chansons pour esprimer mes joies et surtout mes doutes et mes amours déçus.
Pour ce qui est de la peinture et la sculpture à peu près tout se trouve expliqué dans ma présentation sur le site. Le résultat (mes oeuvres) et mon évolution y sont largement repris en image.
Mes débuts réalistes sont plutôt sous représentés car j'ai beaucoup donné de mes tableaux à l'époque. J'avais notamment un collègue à la Banque qui était président de l'association France-Madagascar et qui me demandait à chaque visite officielle d'un représentant malgache, de lui peindre un tableau représentant des paysages de Provence pour le lui offrir. C'est comme ça qu'un certain nombre de mes tableaux se sont retrouvés dans des ambassades ou au siège de l'association. Je ne sais plus malheureusement ce qu'ils sont devenus sauf un qui trône dans le salon du Président que jai revu récemment. De même lors de la création du musée d'art moderne à Tananarive, capitale de Madagascar, j'ai été invité à fournir, gracieusement bien sûr, trois tableaux abstraits qui malheureusement ont péris dans un incendie mystérieux en février 1996. D'autres tableaux ont été donnés à certaines de mes conquêtes dont mon autoportrait de 1970 ce que je regrette le plus. Il doit aujourd'hui crépir quelque part affublé peut être de moustaches. Beaucoup ont dû être perdus depuis. c'est pourquoi par la suite, je n'en ai plus jamais donné sinon à la famille.
Ce qu'il faut surtout retenir de tout cela, c'est que j'ai très vite abandonné dès 1970 le figuratif pour l'abstrait ce qui me paraissait et me parait toujours être le seul digne d'intérêt ( si l'on s'en réfère à l'évolution de l'art depuis les années 1910, date de la première peinture abstraite de Kandinsky que j'adorais). J'eus d'ailleurs la chance de rencontrer, par la banque (il venait retirer de l'argent au guichet), un des derniers élèves du Bauhaus (célèbre école allemande qui révolutionna l'art au lendemain de la première guerre mondiale) Kurt Kranz (mort en 1997) qui habitait à Suzette tout petit village au dessus de Beaumes de Venise sur la route de Malaucène (Il est surtout connu pour ses études photographiques et sa technique sérielle (photos et aquarelles). Je lui ramenais des feuilles de papier Canson (Velin d'Arche) d'Avignon. Je passais des après midi à l'écouter. Il parlait surtout de sa maison qu'il avait fait retaper dans le pur style provencal et de son son jardin qu'il avait aménagé avec goût.(je lui avais même trouvé un jardinier, père d'un amis). Il m'a inspiré mes variations Il me disait toujours de faire attention aux nuances de couleurs. Il m'a appris à trouver les couleurs complémentaires. ( en fixant fermement une couleur et en regardant rapidement sur un fond blanc, la couleur complémentaire apparait un bref instant).
Sinon avec mon copain Gérard nous participions à des expositions dans les villages environnant ou allions quelques fois présenter nos "oeuvres " en bord de mer sur le bas coté de la route. Je me souviens de très belles expositions à Orange et à Pernes Les Fontaines. J'avais même décoré la vitrine d'un magasin de vétements à Orange dans le style Art Nouveau.
Il n'y avait pas beaucoup d'occasions en province de voir de grandes expositions. J'eus tout de même la chance de voir celles de Picasso au palais des Papes d'Avignon en 1970, peu de temps avant sa mort et 1973, 2 mois après celle ci. Il y présentait ses oeuvres les plus récentes qui furent à l'époque éreintées par la presse qui les qualifiait de "calamiteux barbouillages". C'est vrai que ce n'était pas sa meilleure période, mais il y avait une force inouie au travers de ces dernières toiles. Il sentait certainement venir sa disparition et n'avait plus trop le temps de fignoler. Il m'inspira trois ou quatre tableaux mais ce n'était pas vraiment mon style.
Je fus également marqué par l'exposition Rouault à Valréas dans l'enclave des Papes. Il recherchait par ses formes et ses couleurs à refléter la misère humaine. Profondément catholique il a peint de nombreux sujets mystiques comme le Christ. J'ai peint également plusieurs tableaux sur ce thème qui à l'époque me touchait. J'avais même entamé un chemin de croix que je voulais installer dans une chapelle dont je revais l'acquisition. Mais celà ne s'est jamais fait.
J'ai découvert Miro lors d'un voyage à Isola. Je m'étais arrêté à la fondation Maeght à Saint Paul de Vence et fus très impressionné par ses sculptures simples et colorées. Il m'a inspiré lui aussi quelques oeuvres.
Lors d'un autre voyage à Isola (J'y allais beaucoup à cette époque ma soeur Françoise s'y étant installée après le mort accidentelle de Roger son mari. C'est là qu'elle rencontra Emile son actuel mari) je m'arrêtais à Antibes, superbe ville entourée de ses remparts du XVIème siècle qui abrite dans le Fort Carré le musée Picasso.(C'est là que j'ai vu pour la première fois sa chèvre et son taureau faits d'objets de récupération). Il y avait aussi une exposition de Dali et surtout de Nicolas de Stael. Je fus plus impressionné par les applats de couleurs de ce dernier que de la précision bluffante des toiles de Dali, mais je n'en tirais pas vraiment d'enseignement.
Enfin je fus un ardent visiteur du Musée Vasarely à Gordes dans les monts du Vaucluse tout près. Il était installé dans son chateau renaissance, dont l'inauguration eu lieu le 6 juin 1970. Ce ne fut pas une inspiration (trop technique pour moi) mais une découverte d'une branche de l'abstrait, lequel m'attirait de plus en plus. C'était aussi l'occasion de visiter ce super village avec ses Bories et l'abbaye de Sénanque joyau de l'art cistercien. J'y emmenais tous les gens qui me rendaient visite.
Mais l'élément le plus important pour la suite de mon activité artistique fut la découverte lors d'un voyage en Italie, à Turin plus exactement au musée d'art moderne, du peintre italien abstrait Alberto Burri. Ce fut un choc. Il intégrait dans ses tableaux des objets aussi dérisoires que des sacs de jute, de vieux chiffons déchirés, des morceaux de grillage usagés, tout ce que j'avais autour de moi à la campagne (et gratuitement). Cela m'inspira la série des cassures et déchirures.
Depuis, mon art ne procèdera plus ( sauf quelques exceptions comme l'Informel) que du recyclage collage et assemblage d'objet divers de récupération: en bois (la plupart de mes sculptures), pierre, fer ou plastique (Structures). J'ai également été encouragé par les travaux des Nouveaux réalistes (notamment Arman et Tingely), du mouvement Support-Surface (sortir du carcan de la toile) et de l'Arte Povera (mes racines italiennes certainement). Mais il ne faut pas oublier bien sûr le mouvement Dada (Arp, Schwitters) et avant lui le Constructivisme russe (contre-reliefs de Tatline) et surtout le sublime Brancusi qui me révela "l"autosuffisance de l'objet d'art (pas d'autre signification que lui même).
Dans le contexte actuel d'écologie cet ART DE LA RECUPERATION retrouve je crois tout son intérêt.